2017-05-29
Le Québec a beaucoup à apprendre d'Israël

Le Québec a beaucoup à apprendre d’Israël

En matière de développement économique, le Québec a beaucoup à apprendre d’Israël, estime Pierre Boivin, président et chef de la direction de Claridge. L’homme d’affaires prendra part à la mission du premier ministre Philippe Couillard dans ce pays dans les prochains jours, et le modèle israélien sera une source d’inspiration pour le comité qu’il coprésidera pour développer la filière de l’intelligence artificielle. Il s’est entretenu avec La Presse à la veille du lancement de la mission.
Quand on pense à une mission commerciale, on pense spontanément à la Chine, moins à Israël. Pourquoi est-il important de cultiver nos liens avec ce pays ?
« Tout le monde comprend l’importance d’Israël en matière d’innovation, particulièrement dans le secteur des technologies. Je pense que cette mission cherche à mieux comprendre la structure de l’économie israélienne, l’écosystème de développement des technologies. Pourquoi un pays de 8 millions d’habitants réussit-il à avoir plus de prix Nobel par habitant que tout autre pays au monde, plus de brevets par habitant que tout autre pays au monde, y compris la Silicon Valley, et réussit-il à avoir plus d’IPO [appels publics à l’épargne] en technologie que tout autre pays au monde, à part les États-Unis. »

Donc c’est un peu comme un stage d’observation ?
« C’est probablement plus une mission pour apprendre, pour voir ce que d’autres font. Il y aura des liens qui vont se créer, c’est inévitable. Mais je doute que ce soit le but premier. […] Il y a un intérêt et une curiosité de bien comprendre comment Israël a réussi son développement économique, son développement industriel et surtout son écosystème en technologie. »

Claridge a une filière en Israël. Vous qui connaissez le pays, comment expliquez-vous son succès économique ?
« D’abord, il y a un engagement profond envers l’éducation. Et ça, ça fait partie de la culture juive. Peu importe le niveau social ou économique, aller à l’école, réussir à l’école, pousser les études, ça fait partie de la culture. […] Pour eux, l’éducation est absolument primordiale et ils investissent beaucoup, beaucoup dans leur système d’éducation. […] La deuxième chose, il y a eu une prise de conscience au niveau du gouvernement : si on veut faire évoluer la société dans un système dans un certain sens et qu’on veut bâtir des écoles assez fortes en innovation. Il y a eu une espèce d’alignement entre la vision du gouvernement, la vision des universités et l’écosystème entrepreneurial. Et avec ce triangle-là – c’est un peu ce qu’on a annoncé à Montréal lundi avec l’intelligence artificielle –, il y a un alignement en termes de réalisation du potentiel, de connaissance des ressources, le fait qu’on peut en développer d’autres et en attirer d’autres, et amener ça à une réussite sur le plan commercial dans un nouveau secteur, une nouvelle industrie. »

Donc il y a des enseignements à tirer pour le Québec ?
« Je donne un exemple. Retournons en arrière de 25 ans quand Gérald Tremblay a lancé le projet de grappes industrielles. Il n’y en avait pas une grappe d’aéronautique au Québec avant. Mais il y avait un gouvernement qui y a cru, il y a eu deux gouvernements qui ont choisi d’investir pour permettre à Bombardier d’acheter de Havilland et Canadair, et qui leur a permis aussi par un programme de subvention et de formation, de se lancer dans l’aviation commerciale. Tout ça a découlé d’une vision. […] Israël l’a fait avec trois ou quatre secteurs de pointe en technologie. Ils se sont assuré de créer, par leur politique publique, par leur politique fiscale, par leur politique d’investissement, par leurs relations avec Teknion et les universités, ils ont créé de fortes écoles de formation et ils ont créé toutes sortes de programmes d’encouragement à l’investissement et à l’entrepreneuriat.

L’ombre du conflit israélo-palestinien pèse nécessairement sur une mission en Israël. Est-ce que la situation géopolitique a un impact sur le développement des relations d’affaires avec le Québec ?
« Je n’ai pas vraiment d’opinion, et si j’en avais une, je serais très prudent avant de l’émettre. Je vais laisser ça aux politiciens. Ce que je peux dire, c’est que ça n’affecte pas nos décisions d’investissement. C’est vrai que la vie est plus tranquille au Québec qu’en Israël. Mais les entreprises dans lesquelles on investit sont basées en Israël, font des affaires partout dans le monde, qui ne dépendent pas nécessairement de leurs voisins et qui ne sont pas dans le domaine de la défense non plus. Et ça, c’est un choix. »
La Presse
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