2011-05-14
Pierre Boivin change de famille - Des Molson aux Bronfman
Il cède son siège de président du Club de hockey Canadien à Geoff Molson pour occuper celui de Stephen Bronfman chez Claridge. En se joignant à la société d'investissements privés fondée par la famille Bronfman, Pierre Boivin fait ressortir son passé d'homme d'affaires et son expérience opérationnelle dans ce qui pourrait être son «dernier arrêt» professionnel. Les deux nouveaux partenaires insistent: il serait trop réducteur de voir dans leurs intérêts communs pour le sport et le divertissement le territoire qu'occupera Claridge. Stephen Bronfman a annoncé hier la nomination de Pierre Boivin à titre de président et chef de la direction de Claridge. M. Bronfman cède donc son poste au président sortant du Club de hockey Canadien pour retenir la présidence du conseil d'administration de la société d'investissements privés. M. Bronfman copréside également sa fondation familiale tout en multipliant les engagements philanthropiques. M. Bronfman a parlé d'un partenariat entre les deux hommes, conclu après six mois de discussions. «Il apporte son expérience, sa notoriété. Il élève le niveau d'affaires que nous faisons et élargit notre rayonnement dans le segment des financements privés de taille moyenne au Québec, mais aussi au Canada et en Amérique du Nord.» «Cela fait dix ans que nous faisons du placement de capitaux privés. Cela se fait maison, autour d'une bonne équipe. Je n'étais pas sur le marché. Pierre a appelé, le "timing" était bon. Pierre apporte une belle complémentarité. Dans une équipe, la chimie, c'est important», a ajouté Stephen Bronfman, lors d'une rencontre avec Le Devoir. Pierre Boivin est une figure connue de l'industrie des sports et spectacles. «Dans un sens plus large, j'ai travaillé dans l'univers des produits de consommation. J'ai oeuvré à l'échelle internationale», insiste-t-il. Il tient à souligner la compétence de l'équipe de Claridge et le potentiel de ce mariage entre des capitaux privés, qui se veulent patients, et sa force, qu'il situe du côté opérationnel. «Dans ma carrière, j'ai travaillé en bloc de 10 à 15 ans. Claridge serait mon dernier arrêt», ajoute-t-il. «Nous voulons accompagner les entreprises dans leur développement. Tout le monde sait comment maximiser la valeur. Mais appuyer l'entreprise dans sa croissance, dans son développement, prendre des entreprises leaders et les amener à un autre niveau, c'est autre chose», ajoute-t-il. L'action de Claridge sera également étendue à des entreprises de plus grande taille. «Et nous n'agirons pas toujours seuls. Nous visons aussi des partenariats nous permettant de participer à des transactions de plus grande taille. Comme Stephen l'a fait lorsqu'il a manifesté son intérêt pour le Canadien.» «Le Canadien, ce n'était pas que nous. Nous étions au sein d'un groupe de partenaires», a renchéri M. Bronfman. Fondée par la famille Bronfman, Claridge est une société privée très discrète. Elle est présentement active dans les créneaux de l'immobilier, de l'alimentation et du divertissement. L'intérêt de Stephen Bronfman pour le monde du sport et du spectacle est bien connu: on reconnaît la famille Bronfman pour sa présence dans le club de baseball Les Expos. La revue de presse indique qu'il était acheteur du Canadien, du Centre Bell et des activités de divertissement du Groupe Gillett lorsque l'organisation montréalaise fut mise en vente, en 2009. Il est cofondateur du producteur de spectacles TGA Entertainment et Claridge a déjà été actionnaire de TSN et de RDS avant leur vente à CTV, en 1999. Pour sa part, Pierre Boivin est président du Club de hockey Canadien depuis 1999, un poste qu'il cédera en juin au propriétaire du Canadien, Geoff Molson. Il était auparavant président de Canstar Sports, devenue Bauer. Il avait également fondé Norvinca, en 1979. Ces deux entreprises étaient spécialisées dans la fabrication d'équipements sportifs. Étant donné ces intérêts convergents, doit-on penser que Claridge accordera un biais favorable aux investissements dans le monde du sport et du divertissement? «Si une occasion se présentait, on saurait quoi faire. Mais c'est trop réducteur, a répondu Pierre Boivin. Une plateforme importante est déjà en place. Mais le champ est ouvert.» «J'ai grandi avec le sport, a renchéri Stephen Bronfman. Le Canadien, c'est une occasion qui s'est présentée. Mais "business is business".» Le groupe alors dirigé par Stephen Bronfman aurait fait preuve d'ouverture si Geoff Molson avait manifesté un besoin d'aide pour compléter l'acquisition du Canadien. Doit-on comprendre qu'il pourrait en être ainsi si Pierre Karl Péladeau évoquait un tel besoin dans son projet visant à ramener un club de hockey de la Ligue nationale à Québec? «Je suis Montréalais. Ce ne serait pas dans mes plans», a répondu Stephen Bronfman, avec un sourire. Pierre Boivin rappelle pour sa part qu'il siège toujours au conseil d'administration de l'organisation montréalaise. Et qu'il demeure président de la Fondation des Canadiens pour l'enfance. Il reprend l'expression consacrée: «J'ai le CH tatoué sur le coeur.» Mais tous deux admettent qu'une rivalité Québec-Montréal pourrait alimenter une certaine dynamique digne d'intérêt. Par Gérard Bérubé Le Devoir Retour...